Le Japon
Cela peut sembler étrange pour quelqu'un qui vient à Tôkyô aujourd'hui, de considérer le Japon comme le pays du silence.
Et pourtant, derrière tout ce bruit, il y a un silence particulier qui est conservé.Michel Butor, Le Japon depuis la France
Derrière la porte fermée, je guette la cloche lentement qui mûrit, un cierge qui brûle, et là-bas dans le chaos des feuilles j'entends la voix du coucou par intervalles qui répond à la prédication éternelle de la cascade. Et c'est là que j'ai compris que l'attitude spécialement japonaise devant la vie, c'est ce que j'appellerai la révérence, le respect, l'acceptation spontanée d'une supériorité inaccessible à l'intelligence, la compression de notre existence personnelle en présence du mystère qui nous entoure, la sensation d'une présence autour de nous qui exige la cérémonie et la précaution.Paul Claudel, Un regard sur l'âme japonaise
Une idée de l'archipel en trois images

© Armen Godel
Tôkyô, Shinjuku ku : Madame Kawai Tomoyo, dans son bar La Jetée, lieu de rencontre obligé des cinéastes aussi bien japonais qu'occidentaux, baptisé
ainsi en l'honneur de Chris Marker, qui fut son client privilégié.
Le maître de Nô

© Maejima Photo Studio
Zeami, le nô Hagoromo (La Robe de plumes)
Tôkyô, Kanze Nôgakudô, 27 février 1994
Shite : Kizuki Takayuki (la divinité féminine céleste)
Tôkyô, Kanze Nôgakudô, 27 février 1994
Shite : Kizuki Takayuki (la divinité féminine céleste)
Le Nô saute aux yeux de celui devant qui il se déroule. On n'en croit cependant pas ses yeux. Il frappe de plein fouet celui qui le regarde. Il l'aveugle. Pareil au choc éblouissant qui frappe l'aveugle et qui lui rend la vue. Il rend aveugle celui qui voit – qui croit voir ! – Il jette dans l'oubli tout ce qu'on sait, qu'on croit savoir. Aveugle, on ne perçoit plus rien, plus rien absolument, on croit ne plus rien percevoir. C'est alors que vacille une vague lumière. On entrevoit, mais autrement, différemment, avec d'autres yeux qui ne sont pas les yeux, tel qu'on n'a jamais encore perçu quoi que ce soit. Cette lumière diffuse baigne le coeur et la pensée qui peut être aussi comprise comme l'esprit. Car le mot coeur – kokoro – signifie conjointement, et sans la moindre distinction, le siège de l'affect et celui de l'intellect, la pensée.A. G., Joyaux et fleurs du NôLorsque j'ai commencé à prendre de l'âge, je me suis mis à aimer des choses de moins en moins réalistes.Bob Wilson